Le saumon ne doit pas couler à flot!
Les fêtes de fin d’année approchent et vous vous demandez ce que vous allez bien pouvoir proposer à vos convives. Pour une grande majorité, le saumon reste un choix assez typique pour un repas de fête et pour être honnête, on pourrait même dire qu’il s’est sacrément banalisé dans nos assiettes depuis les années 90, devenant un aliment du quotidien, souvent choisi par facilité ou pour manger sain (les fameux oméga 3). Pourtant, concernant la consommation du saumon, nous avons de bonnes raisons de lever le pied et de lui préférer des alternatives plus locales, plus durables, respectueuses de l’environnement et de l’avenir de l’espèce. C’est parti pour un petit décorticage des choix qui s’offrent aux consom’acteurs que nous sommes.
A l’échelle mondiale, le marché du saumon est dominé principalement par 4 pays : la Norvège, le Chili, l’Ecosse et le Canada. Nous consommons essentiellement du saumon d’atlantique en aquaculture, élevé en cages, comme les poulets, et donc soumis aux mêmes conditions (stress, maladies, antibiothérapies, surmortalité). Ne vous méprenez pas, votre saumon en provenance de Norvège et du Chili c’est bien du saumon d’atlantique, une espèce quasi menacée mise sur liste rouge. Salmo salar, seul son nom latin, mention obligatoire, peut vous permettre de savoir de quel saumon il s’agit.
Côté impact, pour nourrir un seul saumon il faut pêcher jusqu’à 400 petits poissons sauvages et le saumon est le 2ème plus gros consommateur de soja* (déforestation, profil nutritionnel défavorable). Le saumon est également une des espèces dont la chair est la plus chargée en polluants éternels (PFAS et PCB).
Si on observe la situation, malgré les mises en garde et les appels à l’action des associations, rien ne semble pouvoir arrêter cette industrie pilleuse de ressources, énergivore et polluante (la Norvège a pour ambition de tripler sa production d’ici 2050* !), si ce n’est nous, consom’acteur. Pour reprendre les mots de l’organisation de protection des océans Seastemik « il y a une coresponsabilité des états, des entreprises et de la société civile ». Le saumon jadis mets d’exception doit le redevenir si on souhaite vivre dans un monde respectueux de la nature et de ses enjeux pour l’avenir des générations futures. Vous souhaitez acheter du saumon pour une occasion d’exception ? Si vous optez pour du saumon sauvage, assurez-vous qu’il provienne du pacifique (Oncorhynchus spp.) et que la technique de pêche utilisée soit la ligne ou le piège (pour plus de précisions car il y a aussi des sous-espèces à privilégier, utilisez l’application Ethic Océan et son guide des espèces pour vous aider dans vos choix à la poissonnerie ou au supermarché**). Si vous choisissez du saumon d’élevage, optez pour du saumon d’aquaculture bio (il n’y a pas de soja OGM dans l’aquaculture bio, par contre on en retrouve bien avec le label ASC, le pendant du label MSC de la pêche). Le saumon d’Ecosse label rouge offre également de meilleures garanties côté durabilité.
À défaut de saumon, vous vous demandez toujours ce que vous allez pouvoir servir à votre réveillon ? Avez-vous pensé à la truite ? La truite peut représenter un choix beaucoup plus local. Il n’est pas question de truite sauvage à éviter, mais bien de truite d’aquaculture. En Belgique on trouve La truite d’Ondenval avec à sa tête Nicolas Marichal et Lionel Nailis. L’atelier de transformation avait pour ambition de proposer une truite « grown in Belgium » en bassins de pisciculture mais avec les changements climatiques, ils ont dû faire marche arrière. Depuis ils se fournissent en truites dans le nord de la France, ce qui reste plutôt proche géographiquement, dans une pisciculture familiale, le projet conserve donc une certaine dimension locale. Les truites sont stabilisées durant 3 semaines minimum dans des bassins d’eau de source et nourries avec des granulés à base de céréales et d’huile de poisson. J’ai voulu en savoir plus sur ces granulés mais le secret de la recette semble bien protégé chez le fournisseur (société Skretting, gros fournisseur d’aliments pour l’aquaculture) donc impossible de savoir si il s’agit de soja OGM ou non ou d’autres céréales. Ce manque de transparence est décevant, quand vous achetez un aliment transformé, il y a une obligation légale qui impose aux transformateurs d’indiquer la liste des ingrédients et le contenu nutritionnel, même pour vos animaux domestiques, alors pourquoi pas pour ce type de produit ? Ce manque de transparence pose donc la question de la traçabilité jusqu’à notre assiette. Dommage…
En dehors de la truite, vous pouvez aussi opter pour des noix de Saint-Jacques en provenance de Normandie et de Bretagne. Le poulpe pêché dans l’Atlantique Nord-Est et Centre-Est, également une espèce moins sous pression qui sort un peu de l’ordinaire est aussi un bon choix et si vous considérez que les fêtes de fin d’année sont ce moment d’exception qui se prête au saumon fumé, privilégiez la saumon d’aquaculture bio ou label rouge d’Ecosse.
*Saumon la bombe rose d’un système alimentaire à bout de souffle – Seastemik www.seastemik.org
** Ethic Ocean est une organisation environnementale dédiée à la préservation des ressources halieutiques et des écosystèmes marins. Sa mission est de créer des opportunités de changements et de contribuer à la mise en œuvre de pratiques durables au sein de la filière. www.ethic-ocean.orget www.guidedesespeces.org
