Jus végétaux ou lait de vache, que faut-il privilégier?

Alors que les jus végétaux s’installent de plus en plus dans nos habitudes à l’occasion d’un latte ou pour remplacer le lait dans notre bol de céréales, j’ai eu envie de faire le point sur l’intérêt de ces jus sur le plan nutritionnel, sur leur utilisation et leur durabilité. Sont-ils bons pour notre santé ? Lesquels choisir et sur quels critères ? Ont-ils réellement une meilleure empreinte écologique que le lait de vache ? Peuvent-ils remplacer avec succès le lait de vache dans nos recettes et quelle utilisation pour ces jus qui sont de plus en plus nombreux dans nos rayons ? Pour finir, je vous présente un jus végétal « made in Belgium » le Quinoat de la société Florès. Philippe Limbourg, co-fondateur, nous en dira plus sur les origines de Quinoat et ses perspectives en Belgique.

Avant toute chose, il est important de corriger une petite erreur sémantique. Nous parlons de « jus » végétal et non de « lait » végétal car l’appellation lait concerne uniquement les produits animaliers, à l’exception du lait d’amande (son utilisation remonte au Moyen-Age) et du lait de coco. Ces jus de plantes se divisent en général en 3 catégories : les jus à base de céréales ou simili-céréales (avoine, riz, quinoa), les jus à base de soja et les jus à base d’oléagineux (noix de cajou, noisette, amande). On pourra également voir passer des jus à base de chanvre ou comme en Espagne à base de souchet (horchata). Ces jus sont essentiellement composés d’eau et d’un peu d’huile de tournesol qui permet d’obtenir une texture comparable au lait et sont issus d’une transformation (extraction) indispensable. Les jus à base de céréales seront plus riches en glucides, ceux à base d’oléagineux en lipides et enfin, seul le soja présentera un contenu protéiné comparable à celui du lait de vache, ce qui n’est pas du tout le cas des autres jus. Côté nutritionnel, les jus végétaux ne peuvent en rien être comparés au lait de vache qui contient du calcium, du fer, de la vitamine D, bien qu’il existe des jus végétaux enrichis (principalement en grande surface). Pour ces raisons, les jus végétaux ne sont pas recommandés pour les enfants en bas âge mais peuvent s’intégrer sans problème dès que la diversification alimentaire le permet dans le cadre d’une alimentation variée.

Passé la toute petite enfance, côté digestibilité, les jus végétaux sont une alternative intéressante si on est allergique aux protéines de lait de vache ou intolérant au lactose. En cas de simple intolérance, il ne s’agit pas de se priver de tous les produits laitiers, ce sont surtout le lait et la crème qui sont clairement à éliminer de par leur richesse en lactose. Les jus végétaux ne sont pas sans inconvénients non plus. Attention aux allergies aux noix et au soja, aux résidus de pesticides, à l’arsenic pour le riz asiatique, au nickel pour le soja hors Europe, aux traces de gluten dans l’avoine pour les cœliaques (l’avénine peut également déclencher des réactions similaires chez certains), aux fibres fermentescibles pour les intolérants aux Fodmaps et enfin, aux additifs qu’on retrouve principalement dans les produits industriels de grande surface (épaississants, arômes, conservateurs…). Certains produits rentrent dans la catégorie des hyper-transformés donc soyez attentifs aux étiquettes nutritionnelles et à l’échelle de transformation Nova (application Scan up), tout comme à la quantité de sucre (sans sucre ajouté, c’est l’idéal). Côté bilan carbone, on pourrait croire que l’impact est plus faible pour les végétaux mais si on ramène l’équation à la « valeur nutritionnelle », ce bilan s’inverse, les jus étant d’une faible valeur nutritionnelle et provenant souvent de loin.

En réalité, il ne sert à rien de comparer les jus végétaux et le lait de vache, en dehors de certaines étapes de vie, c’est un choix personnel en fonction de ses besoins, de sa santé, de ses goûts et convictions. A la maison, nous sommes devenus intolérants au lactose avec l’âge, du coup nous avons tendance à remplacer le lait de vache et la crème par des produits végétaux tout en consommant les produits laitiers pauvres en lactose comme le fromage. Ces petits changements n’engendrent pas de déficits nutritionnels dans une alimentation équilibrée et garantissent notre confort digestif. C’est aussi une bonne habitude à prendre pour réduire les protéines animales qui sont en général surconsommées ou en cas de terrain inflammatoire. Côté cuisine, n’importe quelle recette fonctionne à mon sens, que ça soit une pâte à crêpes, un gratin dauphinois ou une panna cotta, je n’ai pas trouvé de recettes qui « tournaient mal » parce que j’utilisais un jus ou une crème végétale à la place du lait et de la crème.

Pour Philippe Limbourg, l’aventure « sans lait » avait déjà débutée il y a quelques année, suite à un problème d’intestin poreux de sa fille de 2 ans et demi, il crée, avec deux associés, la gamme Florès, des crèmes végétales bio solides ou liquides et cuisinables. Par la suite, ils mettent sur le marché un jus végétal bio avec le moins d’ingrédients possibles et sourcés en Belgique: Quinoat. Avec juste 5 ingrédients naturels et plus de 200.000 litres vendus, l’entreprise connaît un franc succès en magasin bio et fait également le bonheur de chefs gastronomiques (dont Humus et Hortense, meilleur restaurant végétal au monde). L’aventure n’est cependant pas un long fleuve tranquille « avec la croissance, le sourcing de quinoa Belge chez Graines de Curieux devient difficile » nous confie Philippe Limbourg, mais Florès ne cède pas à la tentation de prendre un quinoa exotique, 5 fois moins cher mais vide sur le plan nutritionnel. L’entreprise doit également composer avec une concurrence déloyale : non seulement Alpro, mais plus largement les produits à base de soja et de riz bénéficient, depuis 2012, d’une exemption d’accises en Belgique. Ce système des accises« à exception » réduit leur prix de vente de plus de 15 %, créant un déséquilibre sur le marché. Chez Florès, on peine à comprendre ce manque de soutien pour l’économie locale et on attend des réponses des pouvoirs publics interpellés. Pour ne rien arranger, Olympia, l’une de seules laiteries en Belgique capable de transformer le jus végétal ferme ses portes. La situation n’est pas simple, mais la motivation reste intacte chez Florès, qui planche sur un lait d’avoine 100% wallon dégluténisé ou encore un « Cécémel » bio et local. Et nous consom’acteur, on n’attend que ça!